Sommaire
Chapitre 1
Chapitre 2
Chapitre 3
Chapitre 4
Chapitre 5
Chapitre 6

Auteurs
Taliesin
Wulfila
Irminsul

vendredi 8 mai 2009

Revenu en bas, Wulfila se rendit compte qu'il était sec, aussi retira-t-il sa couverture, qu'il plia en huit, avant de la poser sur le comptoir. Irminsul l'imita en suivant. Le Goth et le Celte allèrent prendre chacun une extrémité de la table sur laquelle était posé le saucisson, et la déplacèrent devant le feu. Une fois tous assis, l'aubergiste se lança :
— Bon ! Commençons ... Vous connaissez cette bonne vieille Terre ? Toi, Saxon, tu dois l'appeler Middangeard.
— Oui, en effet ...
— Je suis tenté de dire que je la connais comme ma poche, répondit Wulfila.
— Eh bien, il existe un autre monde.
— Et même huit autres : Osgeard, Hellanham, Eo...
— Non, non ! le coupa Taliesin. Pas ça. Je ne parle pas non plus du Sidh. Non, autre chose ... disons ... un autre ensemble de mondes.
— Un autre Faírhvus ? suggéra Wulfila.
— Je ne sais pas ce qu'est un Frère-l'Ours, ou je ne sais quel mot de cette langue barbare que tu as éructé.
— C'est du gotique, gronda Wulfila, l'air peu commode. Bon, c'est pas grave. Continue ...
— Et donc ces deux Frère-l'Ours communiquent l'un avec l'autre en certains endroits particuliers. Comme cette auberge qui est dans les deux à la fois.
— Pourtant, je ne vois que notre monde.
— C'est à ça que sert mon dispositif. Regardez.
Il se leva et parcourut en quelques enjambées la distance jusqu'à la porte. Il saisit le levier, le baissa d'un tiers, et un volet sorti d'on ne sait où tomba brusquement devant chaque fenêtre, en même temps que les portes se fermaient à clé. Puis il donna un nouveau coup d'un tiers, et il y eut un grondement sourd. Un dernier coup, les portes se rouvrirent, les volets se relevèrent, dévoilant un paysage tout différent. Wulfila qui avait bondi sur ses pieds dès le deuxième tiers se précipita à l'extérieur, suivi de près par un Irminsul interloqué et un Taliesin riant sous cape. L'auberge se trouvait à présent perchée à flanc d'un immense pic et malgré la vue imprenable, on ne pouvait distinguer qu'arbres, alpages, roche et neige : nulle trace d'implantation humaine. Voyant l'expression éberluée de ses compagnons, le Celte reprit la parole :
— Vous avez vu, maintenant venez vous remettre à l'abri, le vent est mauvais ici.
Tandis qu'ils se rasseyaient, il poursuivit :
— Et si vous allez voir au sous-sol, vous verrez que ça a changé aussi. Je ne vais pas vous mentir, je suis là depuis quelques années, et je ne sais pas vraiment comment tout cela fonctionne. Une chose est sure, ça a l'air d'intéresser du monde.
— Et du monde puissant, si j'ai bien compris.
— Même si peu de gens sont au courant. À vrai dire, il n'y en a que deux de vraiment gênants. Tout d'abord, l'Église locale. Pour eux, mon Auberge est une création du diable, qu'il faut détruire. Mais depuis qu'un curé est mort d'avoir lancé dessus une torche qu'une bourrasque inexpliquée lui a renvoyée, ils évitent de s'approcher. Ensuite et surtout le comte. Qui aimerait bien se libérer de la tutelle du duc en allant s'installer sur l'autre monde.
— Et comment se fait-il que tu ne te sois pas encore fait expulser ? Je ne mets pas en doute la vaillance des Celtes, mais enfin, contre quatre Francs normalement constitués ...
— Je me suis toujours arrangé pour ne pas être pris par surprise. Une fois que j'ai tourné le levier, il semble que dans ce monde-ci, mon Auberge ne soit plus qu'une bâtisse en ruine remplie de cochonneries, Donc dès que c'est nécessaire, notamment la nuit, je me barricade.
— Et toi ? interrogea le Goth. Pourquoi tiens-tu autant à cette auberge, qui si je comprends bien ne t'appartenait pas au départ ?
— Je tiens à ce qu'elle reste accessible à chacun, que personne ne l'accapare. C'est pour ça que je refuse de laisser entrer les leudes du comte, ils empêcheraient quiconque d'autre de l'utiliser.
— Je ne vois pas encore vraiment le lien avec nos croyances, fit remarquer le Barde.
— J'y viens. Déjà, ce lieu est un refuge pour tous les « païens », comme ils nous appellent, du moins ceux qui savent se tenir. Et puis ... il y a autre chose ...
— Ah ! Ha ! Voilà qui devient plus intéressant encore !
— Une vieille légende de mon peuple raconte qu'il existe des anneaux magiques, appelés anneaux élémentaux. Ceux-ci seraient habité par l'esprit d'un élément donné, que le porteur de l'anneau pourrait contrôler dans une plus ou moins large mesure, selon sa propre nature. Je n'en sais pas tellement plus.
— Le nom n'est pas tout à fait adapté, affirma Wulfila. Il n'y en a pas que quatre, puisqu'il y a des anneaux d'éléments moins courants, comme la glace, ou la brume. Et puis il y a l'anneau de mort, ce n'est pas un élément, ça ...
Wulfila s'interrompit devant l'expression de totale sidération qu'arborait Taliesin. Méfiant, il demanda :
— Quoi ?
— Co ... Comment ... Comment sais-tu tout ça ? Tu n'es même pas Celte, comment connais-tu cette légende ? Et comment ...
— Holà ! le coupa le Goth. Du calme ! Trop de questions. Je connais cette légende par un Boien rencontré dans les bas quartiers de Bononia. Il m'a dit qu'un jour, leur dieu avait utilisé l'anneau du feu pour brûler une immense clairière au milieu de la Forêt Hercynienne, afin que son peuple s'y installe. Et de fait, cette clairière existe bel et bien. Même si je ne saurais pas dire si c'est un feu qui en est à l'origine. Quant au reste, j'ai ... disons ... déjà vu de tels anneaux. Quand un humain en porte un, il peut commander à l'esprit de l'anneau, un genre de spectre, et lui faire utiliser des pouvoirs mineurs liés à son élément. J'ai .. appris tout ça au cours de mes voyages.
— Eh bien, raconte-nous tout ça, s'exclama Irminsul, qu'une bonne histoire alléchait toujours.
— Si je me lance, notre Celte ne pourra pas finir la sienne avant un mois. Un jour, peut-être ...
— C'est vrai. Bon, j'en avais presque fini. D'après mes informations, certains de ces anneaux seraient dans l'autre monde, et non dans celui-ci. Je comptais aller en quérir un, qui pourrait m'aider à défendre mon auberge. Ça m'éviterait d'avoir à envoyer mes clients au ravitaillement.

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